Début du premier chapitre, de quoi se mettre l'eau à la bouche
Où suis-je ? Tout est si froid et sombre en ce lieu.
Qui sont ces personnes ? En face de moi une rangée de personnes vêtues de noir avance lentement à ma rencontre sans que je ne puisse distinguer leur visage.
Quel est ce bruit ? Un son fort stressant, à vous percer les tympans, un bruit…
Mon réveil ! Déjà sept heures.
Je n’avais pas dû dormir plus de deux heures cette nuit. Alors que je me remettais lentement de cet étrange rêve ? Cauchemar ? J’enfonçai ma tête dans l’oreiller retrouvant rapidement mon humeur noire qui était devenue habituelle ces derniers jours.
Certaines personnes prétendent s’inquiéter pour moi, mais je tiendrai le coup, je n’avais pas le choix. J’imaginais à quel point la journée qui m’attendait allait être la plus douloureuse de ma vie et par là même la plus longue. J’avais en effet déjà eu l’occasion de constater que les moments les plus difficiles avaient toujours tendance à s’éterniser et les bons moments à filer à une vitesse parfois déconcertante… A croire qu’il existait, là haut, des maîtres du temps, qui prenaient un malin plaisir à se jouer de moi. Bref, alors que pour la majorité des personnes, cette journée était une journée comme les autres, pour ma part c’était bien plus que ça, la fin d’une époque heureuse, le début d’une nouvelle qui le serait certainement beaucoup moins.
Une fois le courage retrouvé je me décidai à me lever après un coup d’œil à mon téléphone portable qui affichait encore de nouveaux messages. Sans prendre la peine de les écouter je l’éteignis. Je connaissais déjà le contenu de ces messages, des messages de condoléances malheureusement devenus nombreux ces derniers jours.
Après une bonne douche, de celles que l’on aimerait ne jamais voir se terminer, je me préparai, tentai de faire quelque chose de mes cheveux indomptables et optai au final pour un chignon me donnant une apparence très stricte. Je décidai également qu’au regard des circonstances il était inutile de tenter de me maquiller, cela faisait deux jours entiers que je pleurais, comme en témoignaient mes yeux rouges et gonflés, et ce n’était certainement pas aujourd’hui que je parviendrai à retenir mes larmes. J’enfilai mon tailleur noir, et alors que j’effectuais ces gestes de manière automatique, je laissai mon esprit vagabonder et me remémorai ce que ma vie avait été jusqu’au dramatique évènement qui l’avait chamboulée, ce qui n’eut pour effet que d’accroître mon mal-être et ma souffrance.
Je m’appelais Noamie Mallard, j’avais vingt-deux ans et j’étais une fille plutôt agréable à regarder. Je n’étais pas très grande, mais quand même dans la moyenne, de longs cheveux blonds inapprivoisables et de grands yeux verts. Quant à mon physique, je le trouvais relativement bien proportionné mais cela n’était que le fruit d’une alimentation saine et équilibrée et de séances de sport hebdomadaires. Mon père était le célèbre Jacques Mallard, quarante cinq ans, professeur d’histoire à l’université et grand chercheur. Il s’agissait d’un homme charmant, très apprécié, il était assez grand, brun aux yeux noirs cachés derrière de petites lunettes de forme rectangulaire, mais son visage, qui pouvait paraître sombre lorsqu’on le décrivait, reflétait en réalité toute sa gentillesse. C’était un homme toujours souriant et très serviable. Il aimait les gens et les gens l’aimaient en retour. Quant à ma mère, Mélinda Mallard, âgée de quarante deux ans, était une femme au foyer, une femme entretenue par le salaire coquet de son mari mais pas de celles que l’on voit souvent à la télévision, elle n’était pas de ces femmes à s’occuper en permanence de leur foyer et du bien-être de leurs enfants et de leur mari, elle avait un sacré caractère et était très indépendante. Elle aimait passer ses journées à aider les personnes qui en avaient besoin et était membre de plusieurs associations caritatives. Physiquement, elle avait tout d’une grande femme d’affaire, elle était grande, élancée, des cheveux raides châtains clairs qui lui tombaient sur les épaules, de grands yeux noisette et toujours très bien habillée. Malgré sa sévérité elle avait un cœur en or, elle était un paradoxe à elle toute seule.
En résumé, ma vie n’avait rien d’exceptionnel au regard de celle de n’importe quel jeune de mon âge. Une vie banale, jusqu’à il y a deux jours. En cette après midi de juin ensoleillée, je profitais de mes vacances à la terrasse de l’Atlantide, un café que je fréquentais régulièrement avec Sofia et Maëlis, mes deux amies les plus proches, et alors que nous discutions de nos projets pour l’été à venir mon téléphone portable se mit à sonner. Jusque là rien d’anormal les jeunes d’aujourd’hui passant plus de temps que nécessaire accrochés à leur téléphone, comme me le répétait inlassablement ma mère. Cependant, ce n’était pas un appel comme les autres, c’est ainsi que la nouvelle m’est arrivée :
- Noamie ?
- Oui, répondis-je
- C’est tante Béa
Béatrice, la sœur de ma mère, que je ne portais pas vraiment dans mon cœur et que j’appelai « la grosse Béa ». C’était une grosse femme célibataire, âgée d’une cinquantaine d’années, blonde, toute ridée mais surtout insupportable par son égoïsme et sa prétention. C’était un être détestable qui n’aimait personne et que personne n’aimait. En d’autres termes je la détestais bien que je ne fusse pas certaine que mon animosité fût réciproque. Nous ne nous parlions qu’en de très rares occasions et c’est pourquoi je fus très surprise lorsqu’elle se présenta et je ne pus m’empêcher de penser au fond de moi « qu’est-ce qu’elle me veut celle là ?»
- Cela fais des heures que tout le monde essai de te joindre, reprit elle, il s’est passé quelque chose de grave, rentres chez toi quelqu’un t’y rejoindra…
-Qu’y a-t-il ? M’inquiétai-je
- Ma chérie, papa et maman ont eu un accident de voiture, ils étaient sur la route pour rentrer chez vous, un camion leur a coupé la priorité et…
- Quoi ? La coupai-je. Comment vont-ils ? C’est grave ?
- Ils sont… reprit-elle hésitante
- Quoi ?
- … morts
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